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Guillaume Sulmont

Vers un dialogue social plus vert ?

Dernière mise à jour : 18 juin 2021

Si la crise sanitaire mobilise les énergies et une grande partie du dialogue social aujourd’hui, la crise environnementale et climatique va être l’un des enjeux majeurs des années et décennies à venir, avec des effets sur l’ensemble des activités humaines… y compris l’entreprise et le travail !

Les sujets environnementaux, qu’il s’agisse d’évolution de la stratégie des entreprises les plus émettrices de gaz à effet de serre (industries, mais aussi transport, numérique…) ou d’adaptation du fonctionnement aux évolutions climatiques, vont ainsi s’inviter dans les échanges au sein des instances représentatives du personnel.



Bientôt une prise en compte des enjeux environnementaux dans les consultations du CSE

Après l’annulation partielle de la taxe carbone, une convention citoyenne de 150 personnes a formulé des propositions, reprises partiellement par le gouvernement dans un projet de loi de lutte contre le dérèglement climatique.

Le projet de loi, actuellement en cours de discussion, prévoit d’intégrer les enjeux environnementaux dans le dialogue social. Les consultations, qu’elles soient annuelles (sur la situation économique et financière, sur la politique sociale, sur les orientations stratégiques) ou ponctuelles (à l’occasion d’un projet de réorganisation, d’un déménagement) devront porter également sur les conséquences environnementales des projets et de l’activité de l’entreprise.

Pour permettre cela, la BDES, qui devrait être renommée BDESE (Base de Données Economiques, Sociales et Environnementales, devrait intégrer des informations environnementales. Encore faudrait-il que la BDESE soit complète et correctement mise à jour, ce qui est malheureusement loin d’être le cas dans la plupart des entreprises…

La mission de l’expert qui accompagne le CSE dans les consultations annuelles est également étendue aux informations environnementales : demain, l’expert-comptable pourra demander, outre les traditionnels bilans financiers et bilans sociaux, le bilan carbone de l’entreprise !

Enfin, la négociation sur la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences est complétée en intégrant les enjeux liés à la transition écologique.

Des avancées en demi-teinte... pour l'instant ?

Plusieurs organisations syndicales, relayées par des parlementaires, avaient poussé pour aller plus loin : faire des conséquences environnementales de l’activité une consultation à part entière, au même titre que la consultation sur la situation financière ou sur la politique sociale… proposition rejetée en commission, au risque que l’enjeu environnemental passe au second plan dans des consultations existantes déjà très denses.

Autres propositions, autres rejets : formation spécifique sur les enjeux environnementaux pour les membres de CSE, heures de délégation supplémentaires pour correctement appréhender le sujet…

Le texte est encore en discussion… le temps de rehausser son ambition pour faire de l’enjeu environnemental un sujet au cœur du dialogue social et non pas juste périphérique ?

Des modèles économiques à revoir entièrement

Les énergies fossiles (notamment le pétrole), énergies très concentrées et relativement chères, ont soutenu fortement la croissance du PIB et de la productivité moyenne du travail. Mais depuis quelques années, et la tendance va s’accentuer, le ralentissement de la production de pétrole conventionnel et les premières effets de la prise de conscience du réchauffement climatique limitent la croissance potentielle.

Certains secteurs vont devoir de réinventer totalement : l’industrie automobile, le transport aérien… des métiers vont disparaître ou se réduire fortement, sans être fortement compensés par des emplois équivalents en nombre ou en qualification. Par exemple, la transition du moteur thermique vers le moteur électrique ne nécessite pas les mêmes compétences, ni le même nombre d’ouvriers sur les chaînes de montage…

Mais la transition écologique va toucher tous les secteurs, au vu de l’ampleur de la baisse nécessaire. Alors qu’au cours des 30 dernières années (entre 1990 et 2019), les émissions françaises ont baissé de 20 % (au prix notamment de délocalisations industrielles), une nouvelle baisse de 80 % est nécessaire sur les 30 prochaines années pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Tous les secteurs d’activité devront réduire très fortement leurs émissions de gaz à effet de serre, y compris les services, la distribution, le numérique… Ces objectifs ne sont pas compatibles avec la croissance économique telle que nous la connaissions. Pour survivre, les entreprises devront revoir leur modèle économique et la répartition des richesses.

 

Si les orientations stratégiques ne tiennent pas compte de ces contraintes, si la politique de gestion prévisionnelle de l’emploi n’intègre pas ces évolutions probables, alors le choc risque fort d’être fatal… L’environnement et le changement climatique méritent une place à part entière dans le dialogue social, pour construire un futur durable dans l’entreprise !

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